Moshe Dayan

Portrait d'un chef de guerre Israélien devenu homme poltiique.

8/6/20254 min temps de lecture

Jeunesse et entrée dans la lutte armée

Moshe Dayan naît le 20 mai 1915 dans le kibboutz Degania Alef, en Palestine mandataire. Issu d’une famille pionnière du mouvement sioniste, il rejoint dès son adolescence la Haganah, principale organisation paramilitaire juive. Arrêté par les autorités britanniques en 1939 pour détention d’armes, il est emprisonné deux ans à Acre.

En 1941, engagé aux côtés des forces britanniques contre l’armée française de Vichy en Syrie, il perd son œil gauche d’un tir de sniper. Son bandeau noir devient l’un des symboles les plus reconnaissables d’Israël.

Ascension militaire et victoire de 1967

Durant la guerre d’indépendance de 1948, Dayan commande le front de Jérusalem puis participe aux négociations d’armistice avec la Jordanie. Cette guerre entraîne l’exode d’environ 750 000 Palestiniens ( un déplacement massif connu sous le nom de Nakba ). Plusieurs chercheurs, dont Ilan Pappé et Benny Morris, évoquent la participation de Dayan à des opérations d’expulsion et à la destruction de villages arabes pour empêcher le retour de leurs habitants. Ces événements sont considérés par de nombreux Palestiniens et historiens comme des crimes de guerre, en raison du ciblage de civils et de la volonté de nettoyage ethnique.

De 1953 à 1958, il est chef d’état-major de Tsahal et supervise la campagne du Sinaï de 1956. Après la victoire israélienne, plusieurs unités sous commandement israélien sont accusées d’avoir exécuté des prisonniers de guerre égyptiens, notamment à Rafah et à Khan Yunis. Bien que Dayan ait nié toute implication directe, ces exactions sont restées associées à sa responsabilité de chef militaire.

En 1967, devenu ministre de la Défense, il joue un rôle central dans la Guerre des Six Jours. En six jours, Israël prend le contrôle du Sinaï, de Gaza, de la Cisjordanie (dont Jérusalem-Est) et du Golan. Mais cette victoire provoque un nouvel exode palestinien : environ 300 000 personnes fuient ou sont expulsées. Dayan est particulièrement critiqué pour avoir ordonné la destruction de trois villages palestiniens de la zone de Latrun (Imwas, Yalu et Beit Nuba), rasés au bulldozer et vidés de leurs habitants. Ces destructions, documentées par Human Rights Watch et divers historiens, sont régulièrement qualifiées de violations du droit international humanitaire.

Abdullah el-Tell et Moshe Dayan concluant un accord de cessez-le-feu, à Jerusalem, le 30 novembre 1948

Ariel Sharon et Moshe Dayan pendant une opération militaire le 11 septembre 1956.

Guerre du Kippour et critiques sévères

En octobre 1973, l’Égypte et la Syrie lancent une attaque surprise lors du jour le plus sacré du judaïsme: Yom Kippour. Israël est pris au dépourvu et subit de lourdes pertes lors des premiers jours.

Bien qu’ayant reçu des informations de différents services de renseignement, Moshe Dayan sous-estime la gravité de la situation. L’agent égyptien Ashraf Marwan, que les Israéliens considéraient comme un informateur fiable, leur fournit en réalité des renseignements destinés à désinformer et à retarder la mobilisation israélienne. Cette combinaison de signaux erronés et de sous-estimation stratégique contribue à la surprise initiale et aux pertes importantes.

Si Israël parvient ensuite à inverser le cours du conflit, l’État hébreu subit une humiliation militaire et Dayan voit son image de chef militaire fortement entachée.

De droite à gauche : chef d'état-major David Elliezer, ministre de la Défense Moshe Dayan et Premier ministre Golda Meir en 1973

Carrière politique et diplomatique

Entré à la Knesset en 1959 sous la bannière du Mapai (parti travailliste de gauche), Dayan est d’abord ministre de l’Agriculture. Son influence culmine en tant que ministre de la Défense (1967-1974), puis ministre des Affaires étrangères (1977-1979) dans le gouvernement de Menachem Begin.

À ce poste, il participe aux négociations qui aboutissent aux Accords de Camp David et à la paix avec l’Égypte. Mais en désaccord avec la politique de colonisation de Begin dans les territoires occupés, il démissionne en octobre 1979.

En 1981, il fonde son propre mouvement, Telem, parti centriste favorable à un retrait progressif des territoires conquis en 1967. Bien que Telem n’obtienne que deux sièges à la Knesset, cette initiative montre l’évolution de Dayan vers une position plus pragmatique.

Héritage et fin de vie

Moshe Dayan meurt le 16 octobre 1981 à Tel Aviv, à l’âge de 66 ans, des suites d’une crise cardiaque alors qu’il luttait contre un cancer du côlon. Il est enterré dans le moshav de Nahalal, sa ville d’enfance.

Sa figure reste profondément ambivalente : héros militaire pour certains, responsable d’occupations et d’exactions pour d’autres.

Sources