L'État Islamique au Khorassan EI-K
Analyse de la franchise la plus puissante de l'Etat islamique.
3/23/20254 min temps de lecture
Qu'est-ce que le Khorassan ?
Le Khorasan signifie « là où le soleil se lève ». C'est une région historique dont le nom remonte à l’Empire perse. À l’origine, ce territoire couvrait le nord-est de l’Iran, l’Afghanistan, le Turkménistan et certaines parties de l’Ouzbékistan et du Tadjikistan. Cette appellation faisait référence à l’orient de l’Empire sassanide (IIIe-VIIe siècle), qui voyait cette région comme sa porte d’entrée vers l’Asie centrale.
Avec la conquête musulmane au VIIe siècle, le Khorassan est devenu une province majeure du califat abbasside. La région a ensuite été morcelée entre différents empires.
Le morcellement s’est accentué à l’époque moderne, avec la division imposée par l’expansion russe et britannique en Asie centrale. L’effondrement de l’Empire russe et la naissance de l’Union soviétique ont intégré des parties de l’ancien Khorassan dans des républiques soviétiques autonomes, devenues indépendantes après 1991 : Ouzbékistan, Tadjikistan, Turkménistan. Aujourd’hui, le Khorassan n’existe plus politiquement, mais son nom est repris par des groupes jihadistes pour revendiquer une continuité historique et religieuse. L’État islamique au Khorasan (EI-K) joue sur cet héritage pour légitimer sa présence en Afghanistan et en Asie centrale.




Le Grand Khorassan (VI - XVIIe siècle)
Naissance de l’État islamique au Khorassan : Défections et opportunisme jihadiste
L’État islamique au Khorasan est né en 2015, dans un contexte de fragmentation des groupes jihadistes en Afghanistan et au Pakistan. À cette époque, l’État islamique (Daech) domine le paysage jihadiste mondial après sa proclamation de califat en Irak et en Syrie.
Profitant de cette dynamique, plusieurs talibans dissidents et jihadistes pakistanais prêtent allégeance à Daech, créant ainsi l’EI-K. Son noyau dur provient d’anciens membres du Tehrik-e-Taliban Pakistan (TTP), frustrés par les négociations des talibans avec les États-Unis. L’EI-K attire aussi des combattants d’autres groupes, comme le Mouvement islamique d’Ouzbékistan (IMU) et des factions extrémistes indiennes comme Ansar al-Tawhid.
L’EI-K se distingue immédiatement par son extrême brutalité et son rejet total des talibans, qu’il considère comme trop modérés. Il adopte une vision takfiriste, qualifiant d’apostats non seulement les chiites, mais aussi les sunnites qui ne suivent pas leur doctrine.
Expansion et zones d’influence : Où opère l’EI-K aujourd’hui ?
Dès sa création, l’EI-K s’implante dans l’est de l’Afghanistan, notamment dans les provinces de Nangarhar et Kunar, où il établit des camps d’entraînement et des bases logistiques. Il utilise le Pakistan comme sanctuaire.
En 2025, l’EI-K ne contrôle pas de territoires en continu, mais il maintient des cellules actives à travers l’Afghanistan, le Pakistan et l’Asie centrale. Ses attaques sont de plus en plus fréquentes au Tadjikistan, en Ouzbékistan et même en Russie. L’attaque du Crocus City Hall à Moscou en mars 2024, qui a fait 145 morts a marqué un tournant dans sa capacité de projection internationale.
Différences avec Al-Qaïda : Stratégie, idéologie et vision du jihad
Al-Qaïda privilégie un jihad global progressif, s’appuyant sur des alliances locales et évitant de s’aliéner la population musulmane. L’EI-K applique une vision plus radicale et immédiate, prônant la destruction de tous ceux qui ne suivent pas son interprétation stricte de l’islam.
Un autre point de rupture est leur approche de la lutte contre les chiites. Al-Qaïda, bien qu’hostile aux chiites, évite d’en faire une cible prioritaire pour ne pas créer de divisions au sein du monde musulman. L’EI-K, en revanche, considère leur extermination comme un objectif fondamental.
L’EI-K en 2025, le groupe terroriste le plus dangereux ?
Le 4 mars 2025, Donald Trump a annoncé l'arrestation et l'extradition de Mohamed Sharifullah, cadre de l'EIK et cerveau des attentats de Kaboul en 2021. Ces attaques avaient tué 13 soldats américains.
En 2025, l’EI-K est considéré comme l’une des franchises les plus puissantes de l’État islamique, surpassant Daech en Syrie et en Irak en termes de capacité d’action et d’influence.
Effectifs : Entre 4 000 et 6 000 combattants, un nombre en augmentation depuis le départ américain d'Afghanistan.
Attaques massives ces 5 dernières années :
Afghanistan : Attentat à l'aéroport de Kaboul 170 morts (2021)
Iran : Attentat pendant une commémoration des 4 ans de l'assassinat du général de Kassem Soleimani 96 morts (22024)
Russie : Moscou 145 morts (2024)
avis de recherche puplié en 2021 par le Département d'Etat américain visant le numéro 1 de l'EIK
Conclusion
L’État islamique au Khorasan est plus qu’une simple franchise de Daech : il est devenu l’un des groupes jihadistes les plus actifs et dangereux du monde, avec une capacité d’attaque qui dépasse largement son fief afghan. Son expansion vers la Russie, l’Asie centrale et potentiellement l’Europe en fait une menace prioritaire pour les services de renseignement mondiaux.
Sa montée en puissance souligne l’échec des talibans à stabiliser l’Afghanistan, et le besoin d’une coopération internationale renforcée pour contrer son influence grandissante.
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